Principaux produits chimiques utilisés en Lichénologie
par Jacques Lagabrielle - mic.lagabrielle@wanadoo.fr - 3ème partie


 

1. les produits pour les réactions
colorées thallines

 

2. les réactifs pour l'étude des
structures microscopiques

 

 

3ème partie - Microcristallisation de substances lichéniques

 

Cette technique ancienne, dite d’ASAHINA (1936-1940), rapide à mettre en place, ne nécessitant qu’un matériel simple, utilisable sans précautions particulièrement sévères, peut encore nous rendre service pour la détermination de certains lichens ne contenant qu’un nombre très limité de substances chimiques.

 

La méthode consiste à faire cristalliser les substances lichéniques présentes dans un échantillon de lichen à étudier, à l’aide de réactifs particuliers, qualifiés de réactifs cristallogènes. Des cristaux caractéristiques de la substance lichénique se forment et sont observés entre polaroïds croisés à l'aide d'un microscope.


 

Séance de microscopie au

Laboratoire de la station

d'écologie forestière de

Fontainebleau en février 2009

 

 


 

a) Les produits pour  pour extraire les substances lichéniques : l’acétone et l’hexane

 

La plupart des substances sont extraites avec l’acétone (solvant polaire), d’autres avec l’hexane (solvant non polaire). On peut aussi faire des extractions fractionnées du même fragment d’abord à l’hexane, puis à l’acétone, on obtient ainsi deux extraits, l’extrait à l’acétone étant "allégé" des substances dissoutes dans l’hexane.

 

On entreprendra l’étude des substances lichéniques par microcristallisation d’une espèce lorsque celle-ci aura été déterminée au plus juste ou lorsqu’il y aura doute ou hésitation entre plusieurs espèces, la chimie étant déterminante pour les séparer.


 

 

Les réactifs cristallogènes sont

conservés en flacons fumés

b) Les réactifs cristallogènes

Nous utilisons les mélanges mis au point par Huneck et Yoshimura (1996) et Orange et al. (2010).

Les symboles des réactifs sont de Asahina et viennent de l’Allemand . A = Alkohol = Ethanol = Alcool / E = Essigsäure = Acide acétique / G = Glycerin = Glycerol / W = Wasser = Eau)

 

GAW = Glycérol - Éthanol - Eau (1-1-1)

GE = Glycérol - Acide acétique glacial (3-1)

GAAn = Aniline - Glycérol - Éthanol (1-2-2)

GAoT = o-Toluidine - Glycérol - Éthanol (1-2-2)

GWPy = Pyridine - Glycérol - Eau (1-1-3)

GAQ = Quinoline - Glycérol - Éthanol (1-2-2)

KK = Hydroxyde de potassium (KOH) 5 g dans 100mL d'eau bidistillée.

 


 

 

 

 

 

 

 

 

c) Matériel indispensable pour la microcristallisation

 

- Une plaque chauffante (type chauffe plat) dont la température peut être stabilisée vers 50° ou moins (l’acétone bout à 50°C).

- Des lames et des lamelles pour la microscopie.

- Des tubes à essais en verre (type hémolyse) ou tube PVC type « Eppendorf ».

- Un jeu de pipettes Pasteur.

- Un microscope à grossissement x1000 équipé d’un système de polarisation.

 

Remarques :

- De nombreuses substances sont présentes dans un dépôt, indétectables par microcristallisation : concentration trop faible, technique non adaptée. Elles peuvent perturber la formation de cristaux

- Un dépôt de substance trop épais nuit à sa dissolution et à la formation de cristaux, qui, trop "serrés", ne peuvent se développer.

- Bien choisir le milieu de cristallisation le mieux adapté à la substance recherchée pour éviter des cristallisations parasites des diverses substances.


 

 

 

Quelques gouttes d'acétone extrapure

pour dissoudre les subst. lichéniques

 

 

 

Le dépôt blanc après évaporation

correspond aux substances lichéniques

 

 

 

Dispositif Nikon pour examen

en lumière polarisée/nalysée

 

 

 

Dispositif économique

constitué de 2 feuilles de polaroïd ;

une au niveau de l'oculaire,

l'autre sous la platine.

 

d) Mode opératoire

 

1. Régler la plaque chauffante à environ 40°C- 50°C.

2. Poser une lame et une lamelle sur la plaque.

3. Déposer au milieu de la lame un fragment de thalle du lichen à étudier, d’environ ¼ de cm2, entier, propre.

4. Sur le fragment déposer une goutte d’acétone, attendre son évaporation, passer à la goutte suivante et ainsi de suite jusqu’à l’apparition nette d’un dépôt circulaire blanchâtre, jaunâtre ou transparent.

On obtiendra une extraction plus complète et plus pure des substances lichéniques d’un échantillon de thalle en le broyant ou en le coupant finement, l’ensemble sera mis dans un tube à hémolyse en verre et couvert d’acétone. Après plusieurs heures "d’infusion", on récoltera l’acétone contenant les substances à travers un coton ; cet extrait très concentré, sera déposé goutte après goutte sur la lame, (Lohézic-Le Dévéhat, 2012).

5. Prendre la lame et observer le dépôt de substances au microscope x100, des cristaux caractéristiques sont parfois visibles (ex : acide divaricatique).

6. Retour de l’ensemble sur la plaque; enlever les fragments de thalle et tout autre déchet.

7. Déposer sur le dépôt une goutte du milieu de cristallisation le mieux adapté à la substance que vous cherchez à confirmer.

8. Poser sur cette goutte très doucement la lamelle préalablement posée sur la plaque chauffante (afin que lame et lamelle aient la même température). Le milieu de cristallisation épouse les quatre bords, c’est parfait ; il en manque un peu, déposer une petite goutte sur le bord où un vide d’air persiste, mais ne pas écraser la lamelle.

9. Pour GE et GAW vous pouvez laisser la lame 10 mn ou plus sur la plaque à 40-50°C le temps de la dissolution du dépôt, pour les autres réactifs ne pas dépasser 30°C ou mieux, opérer à température ambiante.

 

- L’observation des cristaux se fait à des grossissements de x50, x100, x600, x1000 en lumière naturelle puis en lumière polarisée-analysée, certains apparaissent très rapidement (acide usnique), d’autres ne sont bien visibles qu’après plusieurs heures. La détermination des cristaux se fait par comparaison avec la littérature disponible, sous forme de photographies, de dessins, de textes descriptifs (cf. références 2, 5, 9, 14, 15, 17, 18, 19, 21, 22, 27, 29, 34 et 35).

 

- Il est possible de conserver certaines préparations quelques semaines, voire quelques années, au moins 3 (à l’exception des cristaux formés avec K et KK), et de se créer sa propre « cristallothèque lichénique ».

 

e) Mode opératoire pour réaliser une préparation permanente

 

- Faire en sorte que le réactif cristallogène ne dépasse pas les bords de la lamelle.

- Luter avec du vernis à ongle transparent « protège vernis » :

• Par points, les quatre angles de la lamelle. Laisser sécher 10 mn

 • Lutter la lamelle tout autour (la lamelle ne doit pas bouger pendant l’opération).

 • Ranger la préparation étiquetée, à plat dans une boîte porte-lames.

 

Remarques

- De nombreuses substances sont présentes dans un dépôt, indétectables par microcristallisation : concentration trop faible, technique non adaptée. Elles peuvent perturber la formation de cristaux.

- Un dépôt de substance trop épais nuit à sa dissolution et à la formation de cristaux, qui, trop "serrés", ne peuvent se développer.

- Bien choisir le milieu de cristallisation le mieux adapté à la substance recherchée pour éviter des cristallisations parasites des diverses substances.

- Des substances étrangères au lichen étudié (ex : sable) peuvent correspondre à de splendides cristaux … à photographier !

- Toute technique demande un peu de savoir faire, "s’entrainer" sur des échantillons bien déterminés aux substances connues. Se créer une « cristallothèque lichénique » sous forme de lames permanentes et de photographies.


 

 

 

 

f) Quelques exemples de cristaux de substances lichéniques (Photos Jacques Lagabrielle)

 

Photos issues de la publication de Jacques Lagabrielle dans le bulletin AFL 2014-2 dans lequel se trouvent 18 planches A4 de photos consacrées aux substances lichéniques, ainsi qu'un exemple d'utilisation pour la détermination de quelques lichens du genre Ramalina.

 


 

 

 

 

 

Acide protocétrarique

 

Formation dans GAAn d’étoiles jaune vif d’environ 10 à 15 microns en lumière naturelle comme polarisée. En lumière polarisée une « Croix de Malte » noire apparaît dans ce soleil.

Extraction à partir de Flavoparmelia caperata.

 

 

Dans GAoT sur la photo


 

 

 

 

 

 

 

 

Acide usnique

 

Dans GE ou GAW formation de cristaux jaunes en lumière naturelle, transparents polychromes en lumière polarisée. Cristaux en aiguilles, en prismes, souvent groupés en étoiles à branches irrégulières. La présence d’autres substances en quantités importantes dans l’extrait ne favorise pas sa formation

 

Photo 1 dans GE

Photo 2 dans GAAn

 

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

Acide stictique

 

cristaux obtenus dans GAoT

 


 

 

 

 

 

Acide divaricatique

 

Réactifs GAW ou GE, entrecroisement de cristaux en angles droits, spectaculaires en lumière polarisée. Les cristaux apparaissent le plus souvent groupés sur les bords extérieurs du dépôt.

 

Conservation de la préparation trois à quatre mois. Extraction de Ramalina  canariensis et de Ramalina requienii.

 


 

 

 

 

 

Atranorine

 

 

Cristallisation dans GAoT

 

Extraction de

 Brodoa intestiniformis


 

 

 

 

 

 

 

Acide évernique

 

Réactif GE, formation en éventail d’aiguilles serrées (Galun, 1970), parfois ces éventails sont groupés en étoiles (Taylor, 1968). Très bonne conservation après plus de six mois.

 

Extraction de Ramalina pollinaria.

 


 

 

 

 

 

 

Acide bourgéanique

 

Réactifs GAW ou GE, longues aiguilles fines indépendantes en éventail, déjà bien visibles en lumière polarisée x50. Très bonne conservation de la préparation. Extraction de Ramalina lacera.

 


 

 

 

Acide salazinique

 

Formation d’aiguilles rouges courbes d’épaisseur inférieure à 1 micron, groupées en gerbes ou en sphères plus ou moins régulières dans KK, très caractéristiques à grossissement x1000 (la préparation ne se conserve pas).

 

Dans GAoT se développent des cristaux fusiformes en formes de bateaux de 100 à 150 microns, souvent regroupés en étoiles irrégulières (bonne conservation de la préparation).

 

Extraction de Parmelia sulcata.

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Acide norstictique

 

Formation d’aiguilles rouges courbes d’épaisseur inférieure à 1 micron, groupées en gerbes ou en sphères plus ou moins régulières dans KK, très caractéristiques à grossissement x1000 (la préparation ne se conserve pas).

 

Dans GAoT se développent des cristaux fusiformes en formes de bateaux de 100 à 150 microns, souvent regroupés en étoiles irrégulières (bonne conservation de la préparation).

 

Photo 2 dans GAAn

 

Extraction à partir de Parmelia sulcata.

 

 

 


Les produits chimiques indispensables aux études macro- et microscopiques des lichens peuvent être obtenus (à prix de revient) auprès de l'AFL (uniquement par ses membres). La confection des réactifs et la livraison a lieu une fois par an avant la session de microscopie de février au laboratoires de Fontainebleau.

 

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