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Principaux produits chimiques utilisés en Lichénologie (1)
par Jean-Pierre Gavériaux
jp.gaveriaux@numericable.fr


 

 

L’association algue-champignon permet la synthèse de métabolites secondaires (acides lichéniques et pigments) que l’on recherche habituellement à l’aide de réactifs macrochimiques spécifiques. Toutefois, les méthodes de détermination ne se limitent pas à ces simples réactions colorées, de nombreuses autres techniques d’analyse existent, qui nécessitent également l’emploi de produits chimiques divers que nous allons présenter.
 

 

Les 5 produits de base pour l'étude des réactions colorées thallines
 

  1. Les produits pour les réactions colorées
 


 

 

 

 

Ces réactions sont très utilisées sur le terrain et au laboratoire. Elles apportent des informations indispensables pour progresser dans les clés de détermination. Trois substances (C, K et P) sont principalement utilisées.

a) L'eau de javel ou hypochlorite de sodium (notée C) : on utilise la solution concentrée du commerce (vendue en berlingots), placée dans un petit flacon en verre fumé de quelques mL, facilement transportable sur le terrain (possibilité de récupérer un flacon ayant contenu un produit pharmaceutique). Le réactif est déposé à l'aide de la spatule solidaire du bouchon sur le cortex, la médulle préalablement dégagée avec une lame de rasoir, le bord de l’apothécie… Instantanément ou dans les quelques secondes qui suivent une coloration se développe (ou non).
Si on désire une réaction plus propre, on peut déposer le réactif à l'aide d'une allumette effilée, d’un cure-dent en bois ou d’un morceau de papier filtre préalablement imprégné de C.
On peut avoir une coloration jaune, orange, rouge, verte… parfois fugace.
Les résultats de ces réactions colorées sont notés C+ suivi du nom de la couleur obtenue (Ex : cortex C+ rouge si on obtient une coloration rouge après avoir déposé C sur le cortex) ou C- lorsqu’il n’y a pas de modification de la teinte.
Quelques exemples de réactions C+ :
Le thalle de Lecanora expallens devient orange (acide thiophanique).
La médulle de Parmelia subrudecta devient rouge-carmin (acide lécanorique).
Les podétions de Cladonia strepsilis donnent vert-bleu (strepsiline), etc.
La solution doit être changée fréquemment. Elle se décompose facilement et doit être renouvelée dès que l’odeur caractéristique de javel n’est plus assez perceptible.

 

 

 

Thalle de Phlyctis argena
de couleur gris verdâtre.
Il devient jaune puis
rapidement rouge après application de K :

Le thalle est K+ rouge

   
 

 

 

 

 

 

 

 

b) La potasse ou hydroxyde de potassium (notée K) : en solution aqueuse (10 à 35 %) placée, comme la précédente, dans un petit flacon et utilisable selon les mêmes modalités.
Quelques exemples de réactions K+ :
Le thalle des Xanthoria est K+ rouge-pourpre (pariétine),
Le thalle des Physcia K+ jaune, (atranorine), celui de Phlyctis argena devient jaune puis rouge avec des cristaux microscopiques (acide norstictique), etc…
Les apothécies et certaines parties du thalle d’Ophioparma ventosum sont K+ bleu-violet (présence d’un pigment la ventosine)…
La solution de potasse absorbe le dioxyde de carbone atmosphérique (CO2), devient progressivement inefficace et doit être remplacée lorsqu’un trouble apparaît. Il est conseillé de posséder une petite réserve de pastilles de potasse (10 grammes suffisent pour de nombreuses années) et de dissoudre quelques pastilles dans un peu d’eau bidistillée afin de renouveler le réactif.

Rebord d'apothécie
K+jaune

Le réactif est déposé; sous la loupe binoculaire, avec l'extrémité d'un cure-dent en bois.

Remarque 1 : certaines réactions notées KC ou CK nécessitent l’application successive des deux réactifs précédents.
Exemples de réaction KC+ : la médulle et les soralies de Parmelia arnoldii deviennent rose-rouge (acide alectoronique) ; les soralies de Petusaria amara deviennent violettes (acide picrolichénique)…
La réaction CK est très peu utilisée, elle permet toutefois de déceler la présence d’acide barbatique (coloration rouge) et d’acide diffractique (coloration jaune orangé), par exemple sur le disque des apothécies d'Usnea florida qui est C+ (jaune orangé).  

Remarque 2 : certains thalles sont de petite taille ou formé de fins filaments (ex : les Bryoria), il suffit de placer quelques fragments sur un petit morceau de papier filtre préalablement imprégné de réactif et attendre que le papier change ou non de coloration. Il est également possible d’extraire les métabolites avec de l’acétone (voir CCM dans la 3ème partie), de les déposer ensuite sur un morceau de papier filtre et de faire les tests après évaporation du solvant. 

Remarque 3 : pour de nombreux lichens crustacés il est préférable d'effectuer les réactions entre lame et lamelle et en observant au microscope ; le spécimen n'est pas abîmé par une tache de réactif et la réaction est souvent mieux visible, en particulier la réaction C+ rouge du cortex de certains Acarospora, la réaction I+ indigo de la médulle de certains Lecidea et Rhizocarpon.

 

 

 

 

 

Thalle de Cladonia
de couleur gris verdâtre.
Il devient rouge après application de P :

Le thalle est P+ rouge

   
 

 

 

 

 

 

 

c) La paraphénylènediamine (para 1-4 phénylènediamine notée P) : préparée au moment de l'emploi en dissolvant dans un verre de montre, un ou deux petits cristaux de paraphénylène-diamine dans une goutte d'alcool absolu (éthanol anhydre).

Ce réactif est toutefois très toxique, il ne doit être manipulé qu'au laboratoire en évitant tout contact avec la peau, les yeux, la langue. L’alcool s’évapore et le réactif ne se conserve pas, la solution alcoolique s’oxyde très rapidement, devient brune et ne peut plus être utilisée après quelques heures.

Actuellement nous utilisons de la paraphénylènediamine stabilisée qui se conserve un peu plus d'un an (ce réactif est disponible lors de nos sessions lichénologiques). Un flacon de 10 mL muni d'une spatule est suffisant pour réaliser des milliers de tests.

 


d) Autres réactifs :

 Les 3 réactifs macrochimiques précédemment cités permettent d’utiliser la très grande majorité des clés de détermination proposées par les auteurs. Seuls quelques cas particuliers font appel à d’autres réactifs comme l’iode et l’acide nitrique.

 - Une solution iodée, le Lugol (noté I), un réactif surtout utilisé en microscopie, dont la préparation est donnée dans la 2ème partie. Cette solution est indispensable pour caractériser par exemple Porpidia tuberculosa à médulle I+ violet, Sphaerophorus globosus à médulle I+ bleu, l’hyménium I+ rouge de certains Arthonia, etc.

 - L’acide nitrique (noté N) : solution aqueuse à 50 % permettra de confirmer certaines déterminations en donnant des colorations rouge-pourpe avec les pigments de structures liées aux apothécies (ex : épithécium de Lecanora crenulata N+ rose pâle, épithécium de Lecidea turgidula N+ rougeâtre, thalle et épithécium d’Aspicilia coronata N+ vert…). Ce produit extrêmement corrosif sera utilisé avec beaucoup de précautions.

 - L’acide chlorhydrique à 10% ou 20% (noté HCl), rarement utilisé par les lichénologues pour faire des tests colorés est souvent utilisé sur le terrain pour mettre en évidence la présence de calcaire dans le substrat. Pour limiter le nombre de produits, on utilise l'acide nitrique à 50% pour faire ce test.

   
 

Les parties 2, 3 et 4 (produits pour les études microscopiques, la chromatographie et les microcristallisations) ont été publiées dans les bulletins de l'AFL ; elles ne sont pas disponibles sur le site.

Les produits chimiques indispensables aux études macro- et microscopiques des lichens peuvent être obtenus auprès de l'AFL. La confection des réactifs et la livraison a lieu une fois par an avant la session de microscopie de février au laboratoires de Fontainebleau.

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